Archives pour la catégorie Mes lectures brésiliennes

A fond dans les préparatifs Brésil

Préliminaires 2015

2 ans sans poser les pieds au Brésil ! Une éternité !

Techniquement, j’avais tenté de remédier à la situation lors de mon dernier déménagement, avec l’achat d’un super paillasson, certes de mauvais goût, mais jouissif dans sa symbolique :  je foule le Brésil tous les jours !

Paillasson_Brésil

Le Brésil et moi avons repris notre souffle pendant cet éloignement, comme deux amants passionnés qui se sont donnés totalement. Une relation à distance je vous dis…Et puis, il est revenu me tarauder… Aimer tant voyager aux quatre coins du monde,  et pourtant décider de retourner cet été au Brésil, alors que cela fait plusieurs mois que je n’ai pas pris l’avion, si ce n’est pas de l’amour? ! C’est que j’ai encore tellement à y découvrir et à partager. Et puis avec un territoire grand comme 15 fois la France, il y a un peu de marge avant la routine.

3 semaines en aout!  A côté de mon dernier périple de 12 mois plus ou moins improvisés, à me laisser porter par le vent et l’en-vie, organiser un tel séjour a tout de la corvée logistique. C’est que j’aime aviser sur place, dar um jeito comme on dit (me débrouiller). Mais alors je me suis souvenue de précédents périples en pleine saison estivale européenne :  de longues heures passées sac au dos, haletante sous le soleil, à errer en sortant de la gare routière pour trouver une pousada (auberge) en enchainant les rateaux : « désolés on est complets ».  Me voila donc résignée à une plongée dans les guides touristiques, à calculer des temps de trajet et à me perdre dans les promotions des Booking et autres Trip advisor, dont les notes d’appréciation en forme d’étoiles normalisent et rassurent, et me désespèrent d’ennui. Où est l’aventure? Cadê?  Pour remettre un peu de fantaisie dans ces circuits conseillés, je change de tactique pour laisser le Brésil me susurrer à l’oreille son parcours.

Je me mets dans l’ambiance!

D’abord je crée de nouvelles playlists tous styles mélangés pour chanter à tue tête, isolée dans ma voiture ou assourdie par le son de la douche, et déambuler en dandinant dans mon salon. Je révise ainsi le kit du kif : le portugais et les pas de base.

Deezer Braziou

La playlist sur you tube

J’augmente les doses littéraires en piochant dans mes provisions toujours renouvelées de romans, et butine ça et là, entre un roman historique, un document, un classique littéraire, disséminés dans l’appartement et les sacs.

Je m’esclaffe avec les sketchs des Portas dos fundos, la Web TV innovante d’humoristes talentueux, qui n’hésitent pas à taper là où ça fait mal (regardez par exemple ce sketch sous titré en français )

Je passe quelques soirées délicieuses à m’évader en regardant les films à succès en V.O. sur YouTube : image et son pourris, bien sûr je ne comprends pas tout, mais j’avoue, c’est un plaisir solitaire qui vaut bien 10 leçons Assimil!

Et c’est comme ça que peu à peu l’itinéraire se dessine. Les envies de Brésil remontent à la surface comme les bulles du Guarana (le soda le plus populaire au Brésil) . Dans mon hamac imaginaire, je me rêve entrain de :

  • Retrouver la démesure époustouflante de la nature brésilienne en retournant admirer les exceptionnelles chutes d’eau d’Iguaçu… le coeur pincé par ce qui se passe en Amazonie avec le génocide de Guarani-Kaiowa et la déforestation accélérée dans l’indifférence politique mondiale. (Pour en savoir plus, l’article du National Géographic.)
  • Séjourner dans une ancienne maison coloniale et m’endormir bercée d’histoires de chercheurs d’or dans le Minas Gerais
  • Dénicher des petits coins sauvages et enchanteurs à une paire d’heures de bus de Rio, loin du bling bling de Buzios, le Saint-Tropez local (un peu comme j’ai trouvé mon petit paradis près de Deauville!)
  • Faire salon sur la plage d’Ipanema avec les copains brésiliens et mater les standards de la beauté locale : cuissots musclés, seins refaits, fesses remontées, tiens, qui est canon cette année?

Il n’y a plus qu’à faire mon sac…

Nossa! Je n’ai plus une tong à me mettre, il était temps.

Tongs blog

 BOAS FERIAS! bonnes vacances!

Quelques suggestions autour du Brésil parmi mes explorations estivales

Cinéma

Que horas ela volta? (une seconde mère) d’Anna Muylaert, 2015

O som ao redor (les bruits de Récife) de Kleber Mendonça Filho, 2012

A deriva (la dérive des sentiments) de Heitor Dalia, avec Vincent Cassel, 2009

Madame Satã de Karim Aïnouz, 2002

Quilombo de Carlos Diegues, 1984

Littérature

Lire et relire l’excellent et savoureux Dictionnaire amoureux du Brésil, Gilles Lapouge, Plon, 2011

Brésil, histoire, société, culture. Lamia Oualalou, La decouverte. 2014. Un portrait documenté et très instructif du Brésil actuel.

Depuis que la samba est samba,  Paulo Lins, Asphalte, 2014. Encore un roman sur les canailles de Rio au début du siècle, un bon divertissement pour la plage. Par l’auteur de la cité de Dieu, le roman paru en 1997 qui a inspiré le film du même nom réalisé par Fernando Mereilles et Kátia Lund.

Le goût du Brésil, Collectif, Mercure de France, 2012. Une merveille : des extraits des plus grands écrits sur le Brésil autour des thèmes de la beauté, de la violence et de la joie. Idéal pour appréhender le pays par la littérature.

 

 

J’en Neymar, vite un livre!

Cette période de « Copa de foutchibole » me donne envie d’ hurler« goooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooool » à m’en vider les poumons comme font les commentateurs de télé (c’est jouissif, essayez !), de jouer à prononcer « Seleção«  en allongeant bien le aoooonnnn de la dernière syllabe avec un air d’initiée ou d’attendre avec impatience la prochaine apparition tout en muscles des gatinhos auriverdes sur le terrain.

Hulk (!)

L’incroyable cri de Gol

J’admets que la saturation menace, avec risque d’overdose de clichés et reportages sur les-jolies-filles-en-string-sur-la-plage-de-Copacabana, sans parler de la navrante soupe musicale officielle, à se demander si le Brésil est bien le pays de la musique. (Découvrez à ce propos l’article de Bossa Nova Brasil : les chansons de la coupe du monde 2014)

C’est pourquoi je vous invite à (re)découvrir le Brésil autrement : après le sport, les images, la musique, et si vous tentiez un peu de littérature ? Et si vous profitiez des vacances pour lire quelques grands écrivains brésiliens ? Voici quelques suggestions de petits bijoux à glisser dans vos bagages :

 J.-M. Machado de Assis. L’alieniste. Collection « suite brésilienne », éditions Metailié, 2012

Excellent livre pour interroger la folie ordinaire et ceux qui oublient que la folie n’est peut être pas toujours là où on le pense…

« Une nouvelle qui, dès 1881, bien avant l’antipsychiatrie, dénonce le pouvoir médical arbitraire. L’aliéniste est-il celui qui soigne la folie, celui qui la fabrique ou celui qui la porte en lui ? »

Alieniste_Machado

Rachel de Queiroz. L’année de la grande sécheresse. Bibliothèque Cosmopolite,Stock,1986

Une écriture intense et percutante, étonnante de maturité pour un premier roman écrit à 19 ans par la première femme a avoir rejoint l’académie brésilienne des lettres. Un témoignage sur les mœurs et les conditions de l’exode vers le sud au début du siècle. La vie dans la région du Nordeste est toujours fortement marquée par ces conditions climatiques extrêmes.

« Les sécheresses cycliques qui s’abattent sur le Nordeste brésilien flagellent une population qui ne quitte sa terre que poussée par la famine et s’empresse de revenir avec les premières pluies.
Mais en cette terrible année 1915 – une des plus cruelles dans le souvenir des Brésiliens – il faut partir, partir sans espoir de retour. Sur l’interminable route qui mène à l’Amazonie et, croit-il, au salut, chemine Chico Bento, accompagné de sa famille. La mort, hideuse compagne de voyage, rôde autour des enfants que la faim exaspère. Vicente, le jeune éleveur, refuse pour sa part de lâcher ses bêtes, et ce sertão aux terres fauves qui est sa raison de vivre.
Son amour pour Conseicão, sa cousine, lui donnera-t-il la force de se battre plus que les autres ? Mais Conseicão, dans un monde à bien des égards encore archaïque, figé dans ses conventions, croira entr’apercevoir un espoir de vie plus moderne, plus loin – ailleurs. Si nul ne sort indemne de la sécheresse, chacun des personnages de Rachel de Queiroz tente de forcer le destin, de vaincre cette même fatalité qui s’abat sur la terre et sur les hommes. »

O Quinze - Rachel de Queiroz

 João Ubaldo Ribeiro. O Luxure. Collection motifs, les éditions du Rocher, 2004

 Parce que c’est l’été…

« La luxure… Se vautrer dans le stupre… Jouir ! Telle fut la ligne vitale de cette inconnue aujourd’hui âgée qui confie ses mémoires charnelles à un magnétophone. D’une totale impudeur, exaltant le sexe dans tous ses plaisirs, elle raconte ses amants et maîtresses avec gourmandise et dans une langue plus que crue. De cet exercice de style – écrire sur la luxure -, le romancier brésilien João Ubaldo Ribeiro fait un livre admirablement dévergondé, empli de drôlerie et de joie, un livre bienheureux comme ces deux bouddhas propitiatoires qui ouvrent le récit. »

O luxure Ribeiro

 Et lui n’est pas brésilien, mais ses aventures passent par le Brésil :

Hugo Pratt. Sous le signe du capricorne. Collection Corto Maltese,Casterman, 1979

 Corto_sous le signe du capricorne

Boas Ferias ! Bonnes vacances !

Le dictionnaire amoureux du Brésil de Gilles Lapouge

Le dictionnaire amoureux du Brésil de Gilles Lapouge est un régal, une merveille qui se lit d’une traite ou se picore au gré de la curiosité. Un dictionnaire qui ressemble plus à un trésor d’histoires à voyager dans la « brésilianité » qu’ à un pavé fastidieux. Un diaporama très personnel, tendre et élégant.

Les thèmes choisis parcourent entre autres l’Histoire, la botanique, la gastronomie, la langue, la géographie, les mœurs. C’est un recueil souvent drôle, qui parle du Brésil avec légèreté et érudition. Beaucoup d’anecdotes amusantes, de portraits, de traductions permettent de s’immerger dans un contexte culturel, de comprendre comment ce pays a été façonné par son histoire.

Découvrez Gilles Lapouge, ce journaliste écrivain voyageur, dans l’émission For intérieur sur France Culture du 17 juin 2011

Gilles Lapouge

Gilles Lapouge. Dictionnaire amoureux du Brésil, Plon, 2011.

« Je connais le Brésil depuis soixante ans, jour pour jour. Il m’a toujours étonné et surpris, parfois énervé, sans me décevoir jamais. Ce dictionnaire voudrait donner à voir ses forêts du début des choses, ses eldorados, les déserts écorchés du Nordeste, la douceur de ses habitants et leurs cruautés, la volupté de Rio, de Brasilia, de Bahia, de São Luis, les fêtes et les sambas, les fascinants poissons de l’Amazone, l’aventure du caoutchouc, du café et de ce bois écarlate qu’on appelle «le bois brésil». Comme je fréquente ce pays régulièrement, je l’ai peint avec mes souvenirs. Je montre ses images. Je me rappelle ses odeurs et ses orages. Parallèlement, je parcours son histoire dont nous ne connaissons en Europe que des bribes, et qui fut brutale et fastueuse. Je parle également du Brésil d’aujourd’hui, partagé entre l’horreur des favelas et l’impatience d’un peuple qui, pour la première fois peut-être, sait qu’il est en charge de son propre avenir. C’est cela, être amoureux d’un pays. »