Archives pour la catégorie Activités

sao-conrado

S’envoyer en l’air à Rio de Janeiro

M’envoyer en l’air, ça m’a toujours beaucoup intéressée. Mais je suis incapable de faire ça toute seule, je suis bien trop émotive pour assurer. Avec quelqu’un qui s’occupe de la technique, alors là, oui, mille fois oui ! Dans ce cas, je m’occupe de choisir le décor, et c’est grand luxe. Au Brésil, j’ai complété le grand chelem. Après le parachute au dessus des chutes Victoria, le parapente à Annecy, le deltaplane à Rio !

Un jour ça m’a pris comme ça (il ne faut pas trop réfléchir), je me lève avec un temps magnifique, je cherche un moniteur sur internet, l’appelle, et nous faisons affaire : « Tudo bem, on passe te prendre dans une demi-heure, et on y va sans tarder pour profiter du soleil » ! Je suis déjà très excitée. 3 heures plus tard, le concierge prévient que quelqu’un m’attend en bas. Oui bon j’étais prête, au taquet même, depuis 2h30 et j’avais déjà rappelé deux fois pour m’entendre dire « oui oui ! on arrive on arrive ! ». C’est ce qui s’appelle se faire désirer : dans mon enthousiasme j’avais un peu oublié que les horaires sont parfois très élastiques à Rio…

Encore un détour le temps de passer chercher une anglaise dans une auberge de jeunesse, nous voici dans le pick-up, les deux blondes avec chacune son moniteur, en route vers Sao Conrado, une très belle plage de la zone sud de Rio, dont le sable moelleux et accueillant fera office de piste d’atterrissage. Passé le très chic Leblon, nous longeons la côte en bas de la favela Vidigal juchée sur la colline qui fait la jonction entre les beaux quartiers, puis nous montons vers la rampe de départ, nichée dans la forêt de Tijuca. Cette forêt, en plein cœur de Rio, fait partie du parc national de Tijuca. La plus grande forêt urbaine du monde anime joyeusement la ville  du sifflement des singes et du chant des oiseaux, et offre un refuge facile d’accès à l’agitation frénétique citadine. J’aime ces milieux qui se mélangent dans la ville : les hibiscus et autres fleurs tropicales entre les trottoirs, les arbres gigantesques aux feuilles immenses parmi les immeubles et ces grandes taches de vert végétal qui égayent l’architecture chaotique et inégalitaire. Je garde un souvenir ému de ma rencontre avec un superbe toucan aux yeux bleus, installé peinard à la cime de l’arbre au dessus d’un arrêt de bus du centre… ça change des pigeons !

Le chemin est gai, nous bavardons, les deux compères retardataires font ça toute l’année, monter les clients et les faire décoller. Voila qui me rassure, après tout je paye quand même pour me jeter dans le vide en faisant confiance à quelqu’un que je ne connais pas ! Je me fie juste à mon postulat : il n’a pas envie de mourir aujourd’hui, c’est une garantie ça non ? L’air de rien je pose quelques questions de sécurité, ce qui les fait bien marrer, et je les taquine aussi légèrement… bref je fais la maline pour oublier le trac. Mais qu’est-ce qui me prend là ? Et s’ils jouaient à me faire vomir ?! Ouf ils ne sont pas trop susceptibles et ricanent, amadoués par mon portugais. Ma voisine anglaise, elle, vient de visiter tous les spots de Rio avec des agences anglo-saxonnes destinées aux touristes qui achètent leurs excursions sur place, et « c’est bien pratique parce que c’est plus facile, c’est sécurisé et en anglais ». Effectivement ce n’est pas négligeable, quand on sait par exemple qu’à Rio il n’existe pas de plan officiel du réseau de bus* ! Allez vous débrouiller pour vous balader sereinement en évitant les favelas…

La route goudronnée nous emmène dans une lente ascension au milieu des arbres qui nous protègent du bourdonnement de la ville, l’air se rafraîchit et sent la terre humide. Arrivés sur la rampe de lancement, il y a déjà une file indienne de deltaplanes installés attendant l’envol et des touristes flageolants qui font les cent pas. Juste en dessous, l’air de décollage des parapentes. La vue sur la plage et la baie est vertigineuse, magnifique. Nous prenons notre tour, le soleil va bientôt se coucher et nous occupons l’attente par quelques consignes et l’harnachement de rigueur. Puis enfin… quand faut y aller, faut y aller ! Le deltaplane est un gros engin complexe à manœuvrer, il n’est pas question d’hésiter, sinon c’est gadin au bout du ponton, et ça, c’est pas une option.

Courir sans s’arrêter, en regardant droit devant, pour essayer d’aller attraper l’horizon maritime avec ses pieds. Youhouuuu! Je crie comme une dératée, ma bouche est déformée par le sourire jubilatoire qui s’accroche aux oreilles, juste le temps de réaliser que je suis vivante, en l’air, et que pour ça tient… J’oublie que je me sens comme un sac à patate avec les jambes tremblantes qui pendouillent dans le vide pour m’en mettre plein les yeux. Quelle délicieuse sensation forte, pouvoir tourner comme un oiseau au dessus de Rio, voisiner dans les nuages avec le Christ du Corcovado, s’offrir un autre point de vue !

J’observe l’alternance des favelas et des grattes ciels, petites bicoques de bric et broc agglutinées sur les collines contre tours cossues érigées sur le plat. Des mondes qui s’intercalent dans des zones bien délimitées, vu du ciel ça saute aux yeux. J’admire la forêt, majestueuse, préservée, dominante avec ses têtes rocheuses, quelle luxuriance ! Le regard porte loin et permet ’appréhender l’immensité sophistiquée de la baie de Guanabara. Le site naturel de cette ville est exceptionnel : quelle émotion ça a du être pour ceux qui sont arrivés par la mer il y a bien longtemps…Même à cette altitude, l’air est doux sur les épaules et les  mollets nus, la chaleur tropicale est palpable. Je me demande ce qui est passé par la tête de cet explorateur français qui a fondé ici une éphémère colonie française. Comment ce De Villegagnon a pu baptiser cet endroit d’un nom aussi glacial que la France Antarctique ! Quelle drôle d’idée ! Peut être, comme moi, a-t-il ressenti le grand frisson ?

Gal Costa – Passarinho (petit oiseau)

Brasil_2014

Futebol, une passion brésilienne

Moi, football du Brésil, je suis le sport préféré de mon pays !  Je règne sur les cœurs de mes supporters et impose le respect à mes adversaires internationaux. On ne me prend pas à la légère !

Ici, (comme ailleurs aussi, c’est vrai), je suis plus qu’un jeu, un sport d’équipe. Je suis surtout un moyen d’intégration, une possibilité d’ascension sociale, un divertissement dans un environnement parfois difficile voire violent. Je produis des stars, des idoles, alimente les rêves des petits et grands. Bien des choses ont lieu en mon nom*…

A domicile, on choisit une équipe (vous avez bien choisi votre camp, n’est-ce pas ?). Et on s’y colle, on la soutient, on sort au stade, on commente, on chante, on hurle, on s’identifie ! Avec les « autres », on se parle, on se taquine, on se dispute, on se hait, on se juge ou on devine sa classe sociale. Ça en occupe du monde, et pas que des hommes, croyez-moi !

Je porte bien des espoirs, et produis de grandes exaltations collectives, presque hystériques. J’alimente tout un business, j’organise les loisirs, je fais partie du quotidien. Et moi je n’aime rien tant que de voir mes passionnés s’enflammer, se déguiser, s’oublier dans l’ivresse de mon jeu, quand je sens qu’il y a du plaisir, de la joie.

Mais allons droit au but, ce que j’aime le plus, c’est quand on joue à l’extérieur pendant les grandes rencontres internationales. Le Brésil est immense, et je fédère au nom du pays tout entier, du Sud jusqu’à l’Amazonie, pour mieux tout désorganiser… je fais mon petit carnaval quoi.

C’est pendant les grandes compétitions qu’on prend la mesure de ma dimension, de l’importance que j’ai auprès des gens. Si ça se joue pendant une coupe du monde, alors là je les ramasse tous, même ceux qui se prétendent indifférents. J’arrive à nous embarquer dans un sentiment d’unité, une fierté joyeuse et conviviale, un temps suspendu. Là je suis capable d’arrêter le pays ! Dans les entreprises, les administrations, les maisons, partout ou presque, le travail s’arrête. Parfois même officiellement ! Pas mal hein ?! Je capte l’attention à travers la télévision, je bats au score ma grande rivale la telenovela.

Je suis si puissant que je suis l’enjeu de débats politiques ! Bon oui, c’est vrai je capte un peu l’argent public au détriment d’autres investissements…je n’aime pas faire de polémiques, après tout je ne suis qu’un jeu, je ne peux pas régler tous les problèmes du pays… mais quand même, au moins moi je soulage, je fais vibrer, je suscite le désir, je fais vivre… et franchement, quand je regarde autour de moi, je me dis souvent, heureusement que je suis là !

* Pour en savoir plus :
Eurosport sur les manifestations et violences autour du football au stade Maracana de Rio
France info sur les soupçons de corruption autour de la coupe du monde de football
Reportage Geopolis sur France 2 sur le ballon rond au Brésil (5’15)

SOM E BOLA : son et ballonimages

Fio Maravilha, Jorge Ben Jor, 1972
Fio Maravilha, de son vrai nom João Batista de Sales est un ancien footballeur brésilien. Il est surtout connu grâce à la chanson Fio Maravilha, composée en son honneur en 1972, par le chanteur brésilienh Jorge Ben Jor. Jorge Ben assistait à un match entre le « Flamengo » et le Benfica Lisbonne au stade Maracanã à Rio de Janeiro. Fio Maravilha était sur le banc de touche, mais devant l’insistance des supporters de le voir jouer, l’entraineur le fit entrer sur le terrain comme remplaçant. Après 33 minutes de la seconde mi-temps, il marqua le but qui est immortalisé dans la chanson :

E novamente ele chegou com inspiração
Com muito amor, com emoção
Com explosão, gol
Sacudindo a torcida aos 33 minutos
Do segundo tempo
Depois de fazer uma jogada celestial
Em gol
Tabelou, driblou dois zagueiros
Deu um toque driblou o goleiro
Só não entrou com bola e tudo
Porque teve humildade em gol
Foi um gol de classe
Onde ele mostrou sua malícia e sua raça
Foi um gol de anjo
Um verdadeiro gol de placa
Que a galera agradecida assim cantava (x2)
Fio Maravilha, nós gostamos de você
Fio Maravilha faz mais um pra gente ver
Il a surgi à nouveau, inspiré comme jamais
Avec tout son amour, son émotion
Son explosivité … but !
Il a enflammé le public à la 33e mn
De la deuxième mi temps
Après avoir signé une action proprement divine
Ponctuée d’un but
Il a d’abord dribblé deux défenseurs
Avant de feinter le gardien
Il n’est pas entré avec le ballon dans les cages
Parce qu’il est humble d’avoir marqué
Il a signé un but de grande classe
Démonstration de sa malice et son talent
Le but d’un ange
Un vrai but d’anthologie
Que les gens, reconnaissants, chantèrent ainsi (X2)
Fio Maravilha, nous on t’adore
Fio Maravilha, mets-en un autre qu’on voit ça

Merci à Terra Brazil, l’agence des voyages sur mesure au Brésil, pour la traduction!

Aqui é o país do futebol (Ici c’est le pays du football), Milton Nascimento, 1970

O futebol, Chico Buarque, 1989
Supporter connu du Fluminense, un des grands clubs de Rio. Une composition digne d’une drible de « football samba », comme a été surnommé le jeu virtuose des équipes brésiliennes.

É Uma Partida De Futebol, Skank, 1996, composition Nando Reis / Samuel Rosa
Avec cette chanson “c’est une partie de football”, le groupe de rock/reggae à succès s’est fait apprécier des supporters. Le clip illustre bien le délire footballistique brésilien.

Brazuca, Gabriel O pensador
Sur ce que le football ne doit pas faire oublier….
Chanteur de rap brésilien originaire de Rio, un des chefs de file de la contestation musicale, Gabriel O pensador raconte l’histoire de 2 frères d’une favela de Rio. Brazuca, que le football a sorti de la misère, et l’autre Zé Batalha, moins doué de ses pieds et donc travailleur pauvre, assassiné par la police qui l’a confondu avec un bandit dans la favela où il est resté à essayer de survivre.. Un des couplets dénonce notamment la situation du Brésil. Il dit à peu près ceci, le pays est :

É campeão da hipocrisia, da violência, da humilhação
É campeão da ignorância, do desespero, desnutrição
É campeão da covardia e da miséria, corrupção
É campeão do abandono, da fome e da prostituição
Champion de l’hypocrisie, de la violence, de l’humiliation
Champion de l’ignorance, du désespoir, de la malnutrition
Champion de la lacheté et de la misère, de la corruption
Champion de l’abandon, de la faim et de la prostitution

LES MUSIQUES DES SUPPORTERS

Um a zero (un à zéro), Pixinguinha
Pixinguinha est un grand compositeur de musique brésilienne (1897-1973), en particulier de choro, un genre populaire instrumental, d’une certaine technicité et qui comporte beaucoup d’improvisations.
Ce morceau a été écrit pour commémorer la première victoire du Brésil dans la Copa America, en 1919.

A Taça do mundo é nossa, hymne populaire
Musique composée pour célébrer la victoire de la Sélection brésilienne lors de la coupe du monde de 1958 en Suède. Cette musique est entrée dans l’histoire des supporters qui continuent à la chanter.

Pra frente Brasil (en avant Brésil) hymne de la coupe du monde de 1970
C’est devenu un hymne très célèbre et toujours chanté par les supporters :
Noventa milhões em ação
Pra frente Brasil
Do meu coração
Todos juntos vamos
Pra frente Brasil
Salve a Seleção
De repente é aquela corrente pra frente
Parece que todo o Brasil deu a mão
Todos ligados na mesma emoção
Tudo é um só coração!
Todos juntos vamos
Pra frente Brasil, Brasil
Salve a Seleção

L’équipe de football du Brésil est surnomée Seleção (Sélection), Auriverdes (Verts et or) ou Scratch ainsi que Canarinho (« petit canari ») en référence au maillot jaune qui est porté par les joueurs lorsqu’elle évolue à domicile. A propos des surnoms, je vous invite à lire l’article fabriquer un prénom brésilien.

Retrouvez sur You Tube ma playlist : futebol – football, une passion brésilienne